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25/02/2016

Convergences [1] : un jeune économiste face à la "mythologie économique libérale"

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Un livre de l'économiste Eloi Laurent (Sciences Po / Stanford) :


 

Nos mythologies économiques*  : dans cet ouvrage, l'économiste Eloi Laurent explique comment les mythes du libéralisme ont « enseveli le débat public ». Une lecture opportune à l'heure où la pensée unique libérale achève de submerger la classe politique : du gouvernement Valls-Gattaz au sarkozysme tardif, et au FN redevenant lepéno-libéral...

Dans un entretien à Libération (23/02), Eloi Laurent explique notamment :

<< L'économie est devenue la grammaire de la politique. Elle a conquis l'espace que devrait occuper une parole politique qui est devenue dévitalisée. […] On martèle que la France est un pays inadapté à la mondialisation, qu'il faut qu'elle défasse son modèle social pour s'ouvrir aux réalités du monde. Ce programme économique largement partagé à gauche et à droite est un conte pour enfants. […] Notre modèle social est notre plus grand atout pour affronter les chocs d'une mondialisation complexe et incertaine dont l'Europe ne nous protège pas... >>

<< Il n'y a rien de convaincant qui laisse entendre que déréguler le marché du travail permettra de réduire massivement le chômage. […] L'existence d'un salaire minimum permet de réduire les inégalités sans aggraver le chômage. Mais le politique s'empare du fantasme de la flexibilité, et ce discours devient un impératif social. [...] Et l'économie devient une espèce de nébuleuse de légendes à usage social... >>

<< La croissance suffirait à faire reculer les inégalités ? Parce que nous avons cru à cette mystification politique, nous sommes passés à côté de la gravité de la crise des inégalités. [Elles] sont non seulement injustes, mais inefficaces. Elles entravent le dynamisme économique, le développement humain et le développement soutenable... >>

Contre la doxa européenne de l'austérité exigeant que l'Etat soit géré comme une entreprise, Eloi Laurent explique que cette assimilation est inepte puisque l'Etat, contrairement aux entreprises, doit échapper aux « horizons réduits de la comptabilité privée ». « Parce que [l'Etat] a pour mission de garantir, dans le long terme, la cohésion nationale au sein des frontières nationales, il doit échapper aux horizons temporels, par définition finis, des entreprises » ! Affaiblir la puissance publique comme l'exige le libéralisme, c'est se priver du seul recours face aux catastrophes de la sphère financière dérégulée.

Tous ces points – et notamment le dernier – se trouvent également dans les textes du pape François : Laudato Si', Evangelii gaudium, discours de Santa Cruz, discours de Ciudad Juarez, etc. On comprend pourquoi les sites catho-libéraux multiplient en ce moment les « documents de formation » enseignant à leurs affidés l'art et la manière « d'être en désaccord avec le pape »... On comprend surtout pourquoi la grande majorité des catholiques français, dans un nombre inédit de réunions-débats paroissiales, sont au contraire « en accord avec le pape » et cherchent à mettre en oeuvre ses orientations. Ils y sont encouragés par les convergences (qui se multiplient) entre la vision catholique de la société et ce que le livre de Jean Duchesne** appelle « la notion de donné », fil conducteur d'une nouvelle pensée séculière redécouvrant les limites et les fondamentaux – en rupture avec le délire libéral. Frères et soeurs catholiques français, c'est l'heure d'aller à la rencontre de tous !

 

ps / Les convergences ne sont pas des unanimismes : Eloi Laurent (par exemple) peut avoir sur d'autres points des idées qui ne coïncident pas avec les nôtres. C'est le propre des dialogues en chantier.

 

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* éd. Les liens qui libèrent

** note note d'hier.

 

Commentaires

PAS DES UNANIMISMES

> "Les convergences ne sont pas des unanimismes" : c'est la loi naturelle de tous les dialogues. Partager une observation commune mais pas nécessairement toutes les interprétations qui en sont possibles.
Discuter avec tous est la norme du chrétien (malheur à lui "s'il n'évangélise pas", dit l'Apôtre). Se dérober à la discussion générale sous prétexte de rester pur : pharisaïsme !
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Écrit par : frère Léon / | 26/02/2016

> Si j'ai bien compris, la « notion de donné » me rappelle la doctrine « a priori » qui a produit la Ligne Maginot, et que De Gaulle n'a cessé de dénoncer avant la 2nde Guerre mondiale. On sait que l'ennemi a simplement contourné la famjeuse li9gne... André Frossard commentait que l'esprit français a tendance à "déduire de circonstances connues d'avance, alors qu'il faut induire" la conduite à suivre à partir des réalités du terrain. J'espère avoir bien compris !

Père J.-C. Alleaume


[ PP au Père. A. :
- Père, j'ai dû mal m'expliquer. La notion de "donné" ne signifie pas cela. Au contraire, c'est une notion positive et partageable par tous : l'idée que la réalité n'est pas notre fabrication, qu'elle existe objectivement, que nous devons en tenir compte, et notamment que la création ("l'environnement") se reçoit et que nous devons en avoir gratitude. Ce qui englobe la condition humaine, etc. Il y a là un terrain de dialogue prometteur entre croyants et incroyants. ]

réponse au commentaire

Écrit par : P. Jean-Claude Alleaume | 28/02/2016

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